Un retard de paiement peut avoir de lourdes conséquences sur la trésorerie d’une entreprise et plus généralement sur sa gestion.

Il est important de réagir le plus tôt possible pour régulariser la situation et éviter un enlisement des difficultés dont les conséquences pourraient être irréversibles pour l’entreprise.

Ce document présente les principales actions en recouvrement amiable ou judiciaire.

Les conséquences d’un retard de paiement

Le retard de paiement des factures par les clients peut être à l’origine de graves difficultés de trésorerie. C’est la raison pour laquelle le chef d’entreprise doit rester vigilant en effectuant régulièrement un suivi de ses comptes clients et en agissant rapidement s’il y a lieu.

A noter : un chef d’entreprise doit toujours avoir à l’esprit le calcul suivant : si son résultat net représente 5 % de son chiffre d’affaires, en cas d’impayé, il devra vendre l’équivalent de 20 fois cet impayé pour le compenser !

Le montant de la dette, l’importance du client, la fréquence des relations commerciales avec celui-ci seront autant d’éléments à prendre en compte pour adapter la forme et le contenu des actions à mettre en oeuvre pour le recouvrement des créances impayées afin de garantir l’éventuelle poursuite de bonnes relations commerciales.

L’huissier de justice est le professionnel habilité à vous proposer une chaîne intégrée du recouvrement de vos impayés, de l’amiable au judiciaire.

A compter du 1er  juillet 2022, l’huissier de justice deviendra commissaire de justice. Cette nouvelle dénomination résulte de fusion des professions d’huissier de justice et de commissaire-priseur prévue par la loi Macron du 6 août 2015.

Recouvrement amiable des créances
  • Lettre de relance

Le recours à une lettre de rappel est recommandé dès lors qu’un retard de paiement est constaté. Elle ne constitue cependant pas une étape préalable à la poursuite d’actions en recouvrement. Transmise par envoi simple ou par voie dématérialisée (e-mail) et rédigée dans des termes courtois, elle permet de connaître les raisons du paiement tardif et de pallier l’oubli d’un client sans l’offenser ou encore mettre en place rapidement un échéancier.

Il est conseillé d’adresser un ou deux courriers au maximum. En effet, la multiplicité des courriers de relance peut démontrer un manque de crédibilité du créancier et se révéler inefficace.

Parallèlement à cette démarche, il sera souhaitable de refuser de nouvelles commandes avec un client retardataire ou de lui imposer un paiement comptant.

  • Mise en demeure de payer

Elle constitue une sommation de payer et permet souvent d’éviter un contentieux. Elle est un préalable souvent exigé par le tribunal, notamment dans le cadre d’une procédure en injonction de payer.

  • La forme de la mise en demeure:

La mise en demeure peut être envoyée sous différentes formes :

– par le créancier directement en lettre recommandée avec accusé de réception
– par voie d’huissier, modalité pourrait avoir un effet psychologique important surtout si la mise en demeure est remise en mains propres.

Cette procédure présente les avantages suivants :
– si un contentieux est engagé, elle sert de preuve de la mauvaise foi du débiteur,
– et, elle constitue le point de départ des intérêts de retard dus par le client retardataire.

  • Le fond de la mise en demeure:

Aucune mention obligatoire n’est légalement exigée. Toutefois, elle doit être rédigée dans des termes suffisamment clairs et formels permettant d’établir une véritable interpellation.

Ainsi, il est notamment recommandé de porter sur la lettre quelques mentions utiles telles que:
– des informations sur l’identité de l’expéditeur, du destinataire ;
– un résumer de la situation et objet du litige et l’objet du litige ;
– le montant de la créance ainsi qu’une demande formelle de son règlement ;
– le délai octroyé pour la résolution du problème ;
– la mention expresse « mise en demeure ».

En matière de recouvrement amiable de créances, le débiteur peut toujours régler sa dette directement auprès de son créancier. S’il conteste l’existence ou le montant de votre dette, il peut saisir la justice.

  • Droit de rétention

Il s’agit d’un moyen de pression efficace permettant au créancier de refuser de livrer ou de restituer au débiteur un bien (matériel ou marchandise) tant qu’il n’a pas été payé des sommes dues en vertu de l’exécution du contrat qui a justifié la remise de ce bien.
Ce droit peut être exercé sans effectuer, au préalable, d’autres démarches ou formalités.

Attention ! Un créancier qui exerce ce droit, ne peut pas vendre ou se servir du bien. Il doit, par ailleurs, en prendre soin. Le débiteur qui subit un préjudice du fait de la rétention d’un bien peut saisir la justice en vue de le récupérer. Si le juge accorde la restitution du bien, le créancier peut, dans certains cas, être condamné à verser des dommages et intérêts.

  • Recours à un cabinet de recouvrement

Des sociétés sont spécialisées dans le recouvrement de créances, parfois regroupées en fédération comme la FIGEC. Elles prennent en charge les relances et mises en demeure pour le compte de l’entreprise. Mais attention, cela a un coût à prendre en considération. Certaines d’entre elles ne prélèvent des honoraires qu’en cas de succès de la procédure de recouvrement, ce qui peut être une bonne solution.

Le recouvrement de créance est une activité strictement réglementée.

  • Procédure simplifiée

La loi du 6 août 2015 a créé une nouvelle procédure de recouvrement de créances déjudiciarisée qui pourra être mise en œuvre depuis le 1er juin 2016.
Cette procédure permet aux petits entrepreneurs de faciliter le règlement de leurs créances civiles ou commerciales nées d’un contrat ou d’une obligation à caractère statutaire.
Le décret du 9 mars 2016 précise les modalités d’application de cette mesure.

  • Le montant maximum de la créance en principal et intérêts est de 4 000 euros.
  • L’huissier, à la demande du créancier, adresse au débiteur une lettre recommandée avec demande d’avis de réception l’invitant à participer à une procédure simplifiée.

Cette lettre doit rappeler au débiteur qu’il peut accepter ou refuser cette procédure.
La lettre RAR et les formulaires de refus ou d’acceptation qui l’accompagnent sont rédigés conformément à des modèles qui seront fixés par arrêté.

  • En cas d’acceptation du débiteur (constaté par l’huissier), la prescription est suspendue et les 2 parties ont 1 mois, à compter de l’envoi de la lettre, pour se mettre d’accord.

La loi du 23 mars 2019 prévoit de remplacer la lettre recommandée avec accusé réception qui permet d’engager la procédure par un simple message transmis par voie électronique. Cette mesure nécessite un décret d’application, elle entrera en vigueur au plus tard le 1er janvier 2020.

S’ils s’entendent sur le montant et les modalités de paiement de la créance, l’huissier délivrera un titre exécutoire au créancier.
Ce titre permet au créancier de procéder à l’exécution forcée de l’accord si le débiteur n’honore pas ses engagements.

  • Cette procédure peut être traitée par voie dématérialisée dans le cadre d’un système de communication électronique placé sous la responsabilité de la chambre nationale de huissiers de justice à l’adresse suivante : www.petitescreances.fr

La loi du 23 mars 2019 pour la programmation de la justice prévoit d’améliorer la procédure simplifiée de recouvrement des petites créances en permettant au débiteur d’y participer par une invitation dématérialisée. Cette mesure, dont l’application nécessite un décret, entrera en vigueur au plus tard le 1er janvier 2020.

  • Recours aux mode alternatifs de règlement des litiges (MARD)

Les MARD sont des processus volontaires par lesquels les parties décident de résoudre leurs différends, sans procédure judiciaire, mais avec l’aide d’un tiers qui assiste les en dehors de l’intervention d’un juge.

Les mode alternatifs les plus courants sont:
– la conciliation
– la médiation
– l’arbitrage
– la négociation
– la procédure participative

Dans tous les cas, les MARD ont de réels avantages par rapport à une action en justice, notamment pour les plus répandus, à savoir la conciliation et la médiation :

– présence et implication des parties dans la résolution du différend,
– rapidité de la résolution des conflits,
– des coûts moindres et connus d’avance,
– peu ou pas de remise en cause de la solution retenue,
– confidentialité de l’action.

La loi de modernisation de la justice du 21ème siècle du 18 novembre 2016 prévoit de rendre obligatoire une tentative de conciliation, médiation ou procédure participative préalable.

  • Obligation d’une tentative de conciliation avant le procès.

Depuis le 1er avril 2015, toutes les assignations en justice doivent préciser toutes les tentatives et diligences entreprises pour aboutir à une résolution amiable du litige.
De même lorsque le tribunal d’instance est saisi non par assignation mais par simple déclaration au greffe, l’entrepreneur doit justifier avoir entrepris des diligences pour résoudre le conflit à l’amiable.

La loi de modernisation de la justice du 21ème siècle du 18 novembre 2016 prévoit de rendre obligatoire à compter du 1er janvier 2020 une tentative de conciliation, médiation ou procédure participative préalablement à toute saisine de la juridiction.

Recouvrement judiciaire des créances
  • L’injonction de payer

Il s’agit d’une procédure de recouvrement judiciaire non contradictoire, rapide et peu onéreuse (environ 40 €) permettant d’obtenir un titre exécutoire sans avoir besoin de se faire assister d’un avocat.
Elle peut être utilisée pour obtenir le paiement d’une créance que le débiteur refuse de payer alors qu’il peut être concrètement prouvé que celle-ci existe.

Conditions
Il est possible de recourir à cette démarche si :
– la créance est certaine, c’est-à-dire que son existence est incontestable,
– son montant est déterminé,
– et sa date de paiement est échue.
 
Tribunal compétent
Le litige relève de la compétence :
– du juge de proximité (pour un litige d’un montant inférieur à 4 000 €) lorsque le débiteur n’est pas commerçant ou si la dette n’est pas de nature commerciale,
– du tribunal d’instance (pour un litige d’un montant compris entre 4 000 € et 10 000 €) ou du tribunal de grande instance (au-delà de 10 000 €) lorsque le débiteur n’est pas commerçant ou si la dette n’est pas de nature commerciale,
– du tribunal de commerce si le créancier et le débiteur sont commerçants ou si la dette est relative à un acte de commerce.

Le tribunal territorialement compétent est celui du lieu où le débiteur a son domicile.

Mise en oeuvre
Une demande écrite doit être adressée au greffe du tribunal compétent.
Cette requête peut être établie sur papier libre ou à partir d’un formulaire type :
– le formulaire Cerfa n° 12948*03 pour une demande devant le président du tribunal d’instance,
– le formulaire Cerfa n°14896*02 pour une demande devant le président du tribunal de grande instance,
– le formulaire Cerfa n°12946*01 pour une demande devant le président du tribunal de commerce.

Elle peut être établie sur papier libre. Dans ce cas, elle doit comporter obligatoirement les mentions suivantes :
– nom, prénom, domicile et profession des créanciers et débiteurs (pour une société : raison sociale, forme juridique, siège social),
– montant de la somme réclamée et origine de la créance.
La requête peut être transmise par lettre simple ou être remise en mains propres au greffe du tribunal.

Il est également possible de remplir le formulaire en ligne, d’y joindre les pièces justificatives numérisées et de signer par certificat électronique.
Dans tous les cas, la demande d’injonction de payer devra être accompagnée des documents justifiant la créance : devis, facture, bon de livraison, lettre de relance, mise en demeure, reconnaissance de dettes.

La loi du 23 mars 2019 prévoit de rendre la procédure en injonction de payer totalement dématérialisée au plus tard le 1er janvier 2020.

Procédure

  • En cas de rejet de la requête par le juge, le créancier ne bénéfice d’aucun recours. S’il entend poursuivre le recouvrement de sa créance, il doit alors assigner le débiteur en justice.
  • Si le juge accepte la requête, il remet une ordonnance portant injonction de payer.
    Le créancier a alors 6 mois pour faire signifier l’ordonnance, c’est-à-dire pour lui faire remettre par huissier une copie certifiée conforme de sa requête et de l’ordonnance rendue.
    Le débiteur a la possibilité de former opposition à l’ordonnance d’injonction de payer dans le mois suivant sa signification par huissier. En l’absence d’opposition dans ce délai, le créancier demande au juge d’apposer sur l’ordonnance la formule exécutoire.
    En cas de non-paiement, une procédure de saisie pourra alors être mise en oeuvre par un huissier de justice.

Pour plus d’information, voir le site des greffes des tribunaux de commerce et la notice réalisée par le Ministère de la Justice 

  • L’injonction de payer européenne (IPE)

La procédure d’injonction de payer européenne est applicable aux seuls litiges transfrontaliers (c’est-à-dire les litiges dans lesquels au moins une des parties a son domicile ou sa résidence habituelle dans un Etat membre de l’Union Européenne autre que l’Etat membre de la juridiction saisie).
Cette procédure peut être utilisée quel que soit le montant de la créance. Elle vise le recouvrement de créances contractuelles pécuniaires, liquides et exigibles à la date à laquelle la demande est introduite.
La compétence juridictionnelle pour délivrer une IPE est, en principe, celle de l’Etat membre où le défendeur a son domicile, ou son siège social pour les personnes morales.
Pour plus d’information, se reporter au site internet de la Commission européenne dédié à l’IPE

  • L’assignation en référé-provision devant le tribunal

Cette procédure a pour but d’obtenir une provision sur les sommes dues dans un bref délai (15 à 30 jours en moyenne). Elle est assez peu coûteuse (environ 85 € + frais d’huissier).
Cette procédure est à conseiller, notamment lorsque le débiteur est au bord du dépôt de bilan.

Conditions :
Il est nécessaire que :
– la créance soit certaine, c’est-à-dire que son existence ne puisse pas faire l’objet d’une « contestation sérieuse ».
– et sa date de paiement soit échue.

Tribunal compétent
Les démarches doivent être effectuées auprès :
– du tribunal d’instance (pour un litige d’un montant inférieur à 10 000 €) ou du tribunal de grande instance (au-delà de 10 000 €) lorsque le débiteur n’est pas commerçant ou si la dette n’est pas de nature commerciale,
– du tribunal de commerce si le créancier et le débiteur sont commerçants ou si la dette est relative à un acte de commerce.

Le tribunal territorialement compétent est celui du lieu où le débiteur a son domicile.

Mise en œuvre
Une demande écrite (avec la mention « référé » sur l’enveloppe) doit être adressée au greffe du tribunal compétent.
Elle doit indiquer notamment l’identité et les coordonnées des parties, le montant de la créance réclamée, et résumer l’objet de la demande et son fondement.
Il est nécessaire par ailleurs d’y joindre la copie de tous documents justificatifs.

A noter : l’assistance d’un avocat n’est pas obligatoire, mais ses conseils peuvent s’avérer utiles.

Procédure
Le créancier doit adresser une assignation à son débiteur afin de l’informer de sa démarche.

Après examen de la demande et audition des parties, le président du tribunal rend sa décision sous forme d’ordonnance.

  • S’il estime la requête recevable et fondée, il accorde la provision et en fixe le montant.

Le créancier peut alors la faire signifier au plus tôt au débiteur, par huissier.
A noter : il est plus prudent de demander au débiteur l’exécution de l’ordonnance après le délai de 15 jours à compter de la date de signification par huissier qui lui est laissé pour faire appel.

  • Si le président du tribunal rejette sa demande, il peut soit :

– abandonner les poursuites,
– faire appel de cette décision dans les 15 jours suivant sa notification,
– assigner le débiteur en paiement «au fond» (voir paragraphe suivant).

Pour plus d’information, voir le site des greffes des tribunaux de commerce

  • L’assignation en paiement au fond

Cette procédure de droit commun permettant d’obtenir un titre exécutoire est plus longue et plus coûteuse. Les parties devront généralement, même si ceci n’est pas obligatoire, être assistées d’un avocat.

A noter : ces contentieux ne peuvent en général pas donner lieu à jugement immédiat. En effet, les parties peuvent émettre de nouvelles conclusions en réponse à celles de la partie adverse et demander des délais pour ce faire.

Tribunal compétent
Le litige relève de la compétence :
– du tribunal d’instance (pour un litige d’un montant inférieur à 10 000 €) ou du tribunal de grande instance (au-delà de 10 000 €) lorsque le débiteur n’est pas commerçant ou si la dette n’est pas de nature commerciale,
– du tribunal de commerce si le créancier et le débiteur sont commerçants ou si la dette est relative à un acte de commerce.

Le tribunal territorialement compétent est en principe celui du lieu où le débiteur a son domicile. Toutefois, si la demande de paiement résulte de l’application d’un contrat, le créancier peut librement choisir de saisir :
– le tribunal du domicile du débiteur,
– le tribunal du lieu de livraison effective des marchandises,
– ou encore le tribunal du lieu d’exécution de la prestation de services.

A noter : une clause attributive de compétence insérée dans un contrat conclu entre commerçants permet de déroger aux règles de compétence territoriale, et de choisir le tribunal à saisir en cas de litige, dès la signature du contrat.

Procédure 
La demande présentée devant le tribunal doit être formée par acte d’huissier assignant le défendeur à comparaître devant le tribunal à une date et à une heure déterminées.

Différentes issues sont possibles :
– soit le débiteur reconnaît sa dette, il est alors condamné à la payer et un échéancier peut être convenu,
– soit il conteste le bien-fondé de sa dette, il lui appartient alors d’apporter les éléments de preuve au juge afin que ce dernier puisse être en mesure de statuer.

Si le juge décide d’accorder un titre exécutoire au créancier, celui-ci devra faire signifier ce titre par un huissier de justice à son débiteur. A la suite de cela, et à défaut d’obtention du paiement, le créancier pourra :
– faire saisir et vendre, par un huissier, les biens du débiteur grâce à ce titre exécutoire,
– ou faire assigner le débiteur en redressement judiciaire.

Une précaution qui peut s’avérer utile : s’assurer

L’assurance-crédit peut permettre à l’entreprise de se prémunir contre le risque normal de perte de créances.

Par ailleurs, de nombreuses compagnies d’assurances proposent des garanties « Assistance juridique » qui peuvent, pour certaines, prendre en charge les frais de procédure en cas de conflit, et notamment d’impayés.
Le recours à une telle garantie est souvent recommandé aux créateurs d’entreprises, qui ne disposent que très rarement d’une assise financière suffisante pour prendre en charge ces frais.